Hommage à Sam Loyd (4.2/4)

Le n°32, intitulé La Stratégie 1867, était dédié « avec beaucoup de respect » à un certain M. Lequesne. On reste sceptique sur la sincérité de ce sentiment, quand on a trouvé la solution...

En 1961 et 1962, Europe Echecs avait commémoré le 50e anniversaire de la mort de Samuel Loyd (1841-1911), qui peut à bon droit passer pour le plus original des compositeurs.

Le problémiste français Roger Diot (1923-1981) s'était acquitté de ce devoir de mémoire en présentant une série de 32 diagrammes, « livrant un aperçu valable de la manière du Roi du problème ».

Ce dernier article traite à nouveau du thème des « Embuscades, farces et attrapes ». Voici quatre des œuvres les plus savoureuses du génial compositeur américain.

N°29

Commençons par une devinette : saurez-vous retrouver le dernier coup joué par les Blancs ?

Les Blancs viennent de donner échec, mais les trois hypothèses a7-a8♗+, bxa8♗+, bxc8♕ doivent être rejetées, car elles exigent un minimum de dix prises par les pions blancs. Ce qui, compte tenu de la présence de six pièces noires au diagramme, est incompatibles avec la capture « à domicile » du Fou f8.

On ne peut retenir non plus le coup ♔f3-g3+, puisque le Roi blanc en f3 se serait trouvé sous un double échec (Dame et Tour) non produit par le jeu d'une batterie. Il reste heureusement une dernière hypothèse, la bonne !

Un Fou « claquemuré » et un Roi à la troisième rangée de son camp : deux indices devenus familiers aux amateurs d'analyse rétrograde - mais en 1891 !

N°30

Ce problème recèle un piège subtil. Le coup de clé doit libérer la case d5, en vue de la menace longue 2.♗d5 et 3.♘d6 mat. Mais la case d'arrivée du Cavalier n'est pas indifférente, car en jouant 1...g1♗!, les Noirs préparent l'immobilisation totale de leurs pièces après 2. ♗d5 (pat).

N°31

La clé est typiquement « Loydesque » : pourquoi donc mettre sur a8 un Cavalier complètement hors jeu ?

N°32

Ce problème était dédié « avec beaucoup de respect » à un certain M. Lequesne. On reste sceptique sur la sincérité de ce sentiment quand on a trouvé la solution... On peut, pour le moins affirmer que ce respect n'était pas exclusif de malice !

Solutions

N°29 - US Chess Association, Lexington 1891

Rétrogradant de deux temps, on place un pion noir en f4 et un pion blanc en g2. Dans cette position, la Dame noire vient de donner échec. Les Blancs parent en jouant 1.g4, à quoi les Noirs répondent par 1...fxg3+ en passant : le double échec que reçoit le Roi blanc en f3 est cette fois explicable sans infraction aux lois du jeu ! Les Blancs le parent en jouant 2.♔xg3+, ce qui redonne bien la position du diagramme et constitue la seule réponse à la question posée.

N°30 - US chess Association, Saint-Louis 1889

Seule la clé 1.♘b4!, mobilisant le pion c5, supprime la possibilité de l'énoncé, suivie du mat en deux : par exemple 1...gxf1♕ 2.♗d5 -- 3.♘d6#.

On notera là encore l'illégalité (absolue) de la position : les pions noirs ont fait au minimum six prises, et il ne manque que cinq pièces blanches.

N°31 - Holyoke Transcript 1876

1.bxa8♔xg2, le pion a7 (qui lui doit se promouvoir en Dame !) serait perdu si le coup 2.♘b6! n'interceptait pas le Fou g1 décloué.

N°32 - La Stratégie 1867

1.♕g4+ f5 2.gxf6# en passant : un mat à la découverte peu banal.


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