Bien réussir son début de partie aux échecs : conseils et stratégies dans l’ouverture

L’ouverture aux échecs

Aux échecs, le début de partie revêt une importance capitale. L’ouverture est en effet le point de départ de votre stratégie, où chaque coup peut influencer la suite de la partie. Dans cet article destiné aux joueurs amateurs, nous allons explorer les meilleures pratiques pour bien démarrer une partie d'échecs, en examinant les conseils essentiels, les erreurs à éviter et les meilleures stratégies pour progresser dans les ouvertures.

Pourquoi est-il utile de bien jouer dans l'ouverture ?

"Le début de partie ressemble à un mécano dont les premières pièces s'accrochent au centre de l'échiquier ; de la fiabilité de votre montage dépendra le succès de votre partie."

(Albéric O'Kelly de Galway)

L'ouverture d'une partie d'échecs est souvent comparée à la préparation d’une bataille, durant laquelle le général tente de placer de la meilleure façon possible ses troupes. De la même façon, le début d’une partie d’échecs détermine la position des pièces sur l'échiquier et établit le cadre stratégique pour le reste de la partie.

Une façon idéale de commencer la partie avec les blancs, avec le centre occupé, les pièces développées et le roi à l’abri ! Mais les noirs ne se laisseront pas faire…

Bien jouer dans l'ouverture offre plusieurs avantages : vous pouvez prendre le contrôle du centre de l'échiquier, développer rapidement vos pièces et garantir la sécurité de votre roi.

Mais n’espérez pas prendre un avantage décisif dès les premiers coups. Une partie d’échecs est un long combat, et l’ouverture n’en est que le prologue. Ne tentez donc pas de mener une guerre éclair, votre ambition doit se limiter à disposer de façon harmonieuse vos pièces pour entamer de la meilleure façon possible le combat du milieu de jeu.

« Votre seul travail dans les ouvertures est d'obtenir un milieu de partie jouable. »

(Lajos Portisch)

Conseils indispensables pour réussir son ouverture

Jouer les premiers coups peut être intimidant. L'essentiel est de maîtriser les grands principes qui gouvernent les premiers coups.

Le maître Reuben Fine en a identifié dix, et ils ne sont pas très compliqués :

1. Occupez le centre avec vos pions.

2. Sortez vos pièces, si possible en attaquant les pièces adverses.

3. Développez vos cavaliers avant vos fous.

4. Ne déplacez pas une deuxième fois une pièce déjà développée.

5. Jouez au maximum deux pions lors de l'ouverture.

6. Ne sortez pas votre dame trop tôt, car elle serait exposée aux attaques.

7. Roquez le plus vite possible.

8. Jouez pour contrôler le centre de l'échiquier.

9. Gardez toujours au moins un pion au centre.

10. Surveillez vos pièces pour ne pas les perdre.

S'il peut exister des exceptions, ces 10 principes simples vous permettront d'obtenir une position satisfaisante dans l'ouverture !

Les cinq coups parfaits des blancs selon le grand maître Edmar Mednis

Conformément à ces principes, le grand maître international américain Edmar Mednis recense cinq coups parfaits pour les blancs dans son livre Comment bien jouer l’ouverture.

Le coup 1. g3 semble contrevenir au principe d’occupation du centre. En réalité, il a pour objectif de développer le fou en g2, et ainsi de contrôler le centre à distance. Une approche hypermoderne plutôt recommandée pour les joueurs aguerris !

Le coup 1. b3 semble possible, dans le même esprit. Cependant, pour Mednis, ce coup est inférieur car il “n’améliore pas la sécurité du roi en préparant le petit roque”.

“Dans les ouvertures, j'ai juste besoin d'aboutir à une position qui me donne du jeu. L'idée est d'être malin plutôt que d'essayer d'écraser l'autre.”

(Magnus Carlsen)

Un exemple de ce qu'il ne faut pas faire !

Aucune contrôle du centre, des pièces encore sur leur case de départ, une tour développée avant les fous : rien ne va dans ce début de partie des blancs !

Attention, tout peut se jouer dès les premiers coups !

Surtout, n’oubliez pas que le combat tactique débute dès le début de partie :

  • Vérifiez qu’aucune de vos pièces ne peut être capturée par votre adversaire.
  • Sautez sur l’occasion de gagner du matériel si votre adversaire laisse un pion ou une pièce en prise.

Ces deux conseils de base sont rarement rappelés dans les livres et articles consacrés aux débuts de partie. Ils sont pourtant essentiels : il est plus important de capturer la dame en prise de votre adversaire que de roquer ! De même, protéger une pièce menacée par votre adversaire doit être votre principale préoccupation, bien plus que d’occuper le centre.

Dans votre réflexion, ces deux points sont donc prioritaires, et l’emportent sur toutes les autres considérations.

Les grands principes des ouvertures vous indiquent qu’il faut ici roquer ou sortir votre cavalier. Mais il est possible de capturer le fou des noirs, le reste est donc secondaire !

Faut-il tenter de placer le coup du Berger ?

Le célèbre coup du Berger, terreur du débutant, permet de faire échec et mat en seulement quatre coups ! Mais pour y parvenir, vous devrez jouer des coups médiocres, par exemple en sortant prématurément votre dame. Il n’est donc pas recommandé d’utiliser cette technique, qui ne marchera que contre des adversaires très faibles… que vous auriez battus de toute façon !

Car si votre adversaire parvient à parer le coup du Berger, votre position ne sera pas brillante. Hélène Ruhlmann vous propose de découvrir en vidéo comment parer simplement cette technique.

Faut-il apprendre par cœur de nombreuses variantes dans l’ouverture ?

"Ce n'est pas en apprenant les variantes qu'on arrivera à bien jouer les débuts, mais en comprenant leur sens, leur but, les idées et principes qui en sont la base."

Eugène Znosko-Borovsky

Aucune ambiguïté : non, les débutants n'ont pas besoin d'apprendre des centaines de coups par cœur !

Pour les joueurs amateurs, le plus important est de comprendre les grandes idées des ouvertures, d’identifier les schémas et d’avoir en tête les plans typiques en fonction de la position.

Dans son ouvrage de référence Les Idées cachées dans les ouvertures d'échecs, le grand maître Reuben Fine, déconseille fortement l’apprentissage de longues variantes par cœur, du moins pour les amateurs.

“Une partie commence par 1. e4 f6. Cette réponse est mauvaise ; elle est même tellement mauvaise qu’on ne la trouvera nulle part dans les compilations de coups d’ouverture normaux. Comment faut-il réagir ? Celui qui aura appris par cœur des pages et des pages de coups sans trop les comprendre se sentira perdu ; il ne sera même pas capable de trouver une bonne raison pour expliquer que ce coup est mauvais. Mais celui qui sait que les Noirs ont négligé le centre, privé leur cavalier de sa bonne case et affaibli la position du roi trouvera facile de tirer parti de cette faute”.

En résumé, plutôt que de réciter des coups, il est essentiel de comprendre la position et les règles qui guident le début de partie !

Pour progresser, repérez les schémas typiques, et en particulier le positionnement des pions qui forment dès l’ouverture le squelette de la position.

Ici, un joueur expérimenté avec les blancs sait qu’un plan possible consiste à pousser son pion b à l'attaque, pour détruire l'assise centrale des noirs. Cela prendra peut-être dix ou vingt coups, mais donne dès l’ouverture de bonnes indications sur la façon de jouer la partie !

Avant cela, il doit développer son fou de cases blanches et mettre son roi à l'abri.

Mémoriser des variantes devient utile lorsque l’on commence à jouer à un niveau compétitif (>1800), et même indispensable pour les maîtres et grands maîtres qui jouent à très haut niveau. Mais vous n’êtes probablement pas dans ce cas de figure !

Comment progresser dans l'ouverture ?

Par des livres

Il existe de nombreux ouvrages spécialisés sur une ouverture spécifique, comme la Sicilienne ou la défense française. Ces livres ne s’adressent qu’à des joueurs confirmés, qui participent à des compétitions. 

Le livre de Marc Quenehen est idéal pour apprendre l’ouverture Sicilienne.

Comme à son habitude, l’auteur insiste sur les plans stratégiques, plutôt que de proposer des variantes à rallonge. Une approche malheureusement assez rare !

Dans la revue Europe Échecs, le grand maître Igor Nataf décrypte chaque mois une ouverture.

Par des vidéos

Pour les débutants ou les amateurs, il est préférable de se tourner vers des vidéos d’initiation.

Dans la série de vidéos "Top Départ", le maître Bertrand Valuet explore les fondamentaux des ouvertures. Il présente une approche simple et efficace pour commencer une partie d'échecs, qu'il nomme "la technique du château".

Les débuts de partie sont en constante évolution, car les grands maîtres continuent de découvrir de nouveaux coups qu'ils ajoutent à leur répertoire. Certaines variantes gagnent en popularité tandis que d'autres sont reléguées au second plan.

Pour les joueurs amateurs, il peut être ardu de saisir les subtilités des ouvertures employées par les champions. C'est pourquoi nous mettons à votre disposition la série de vidéos "les Ouvertures en Vogue", dans le but de rendre ces nouvelles tendances plus accessibles et compréhensibles.

Pour aller plus loin dans la maîtrise des débuts de parties, nous vous proposons la série "Ouverture en duo". Le grand maître Bachar Kouatly et l'entraîneur Marc Quenehen vous font vivre l'ouverture comme une aventure, avec des explications à la fois techniques et historiques. Passionnant !

Testez vos débuts de partie sur une zone de jeu en ligne

Enfin, rien ne remplace la pratique ! Jouer régulièrement vous permet d'accumuler de l'expérience et de développer des réflexes, en particulier dans les ouvertures. Tout comme un athlète qui s'entraîne par des exercices réguliers, le joueur d'échecs progresse en pratiquant.

Pour trouver des adversaires, vous avez la possibilité de vous rendre dans un club d'échecs près de chez vous. Cependant, grâce à Internet, il est désormais facile de défier des joueurs du monde entier en quelques clics seulement ! Les plateformes de jeux en ligne ont connu une croissance rapide depuis la pandémie, offrant ainsi la possibilité d'affronter des adversaires du monde entier. Europe Échecs met à votre disposition une zone de jeu dotée de nombreuses fonctionnalités.

Est-ce utile de beaucoup travailler les ouvertures lorsque l'on est débutant ou joueur amateur ?

Comprendre les grands principes du début de partie est rassurant et vous met sur la voie d'une position favorable lors du milieu de jeu. Cependant, il est courant de voir de nombreux joueurs amateurs travailler à l’excès les ouvertures, négligeant les autres aspects du jeu d’échecs. Il est conseillé de ne pas y consacrer un temps excessif : vous verrez des résultats plus significatifs en consacrant votre énergie à la tactique ou aux fins de partie.

Une bonne répartition du temps consacré à votre étude du jeu d'échecs, suivant les recommandations du grand maître international Noël Studer.

Pour progresser efficacement aux échecs, il est indispensable de bien répartir son temps d'entraînement entre les différents aspects du jeu.

Voici une méthode recommandée pour organiser votre étude du jeu :

  • Consacrez environ un tiers de votre temps à l'étude et à la résolution d'exercices tactiques.
  • Allouez un autre tiers à jouer des parties, en les analysant attentivement par la suite.
  • Enfin, consacrez le tiers restant à l'étude des fins de partie, des ouvertures et de la stratégie.

« Après une mauvaise ouverture il y a encore de l'espoir dans le milieu de match. Après un mauvais milieu de partie il reste de l’espoir dans la fin de partie. Mais une fois arrivé dans la finale le moment de vérité est arrivé... Le nombre de points qui peuvent être gagnés (et sauvés) en jouant correctement les fins de partie est énorme. »

Edmar Mednis

Quelle ouverture jouer ? Faut-il varier ses débuts ou se spécialiser ?

Il existe une multitude de débuts de partie, chacun avec ses propres caractéristiques et stratégies. Expérimentez différents débuts pour trouver celui qui correspond le mieux à votre style de jeu !

Si vous aimez les parties d’attaque, optez pour des débuts ouverts, dans lesquels les pièces peuvent jouer librement. Avec les blancs, débutez plutôt par e4, et avec les noirs jouez la défense sicilienne (1. e4 c5).

Si vous vous sentez plus à l’aise dans les longues manœuvres stratégiques, privilégiez des débuts avec un centre de pions fermé. Si vous avez les blancs, ouvrez la partie par 1. d4, coup qui amène généralement des parties moins tactiques. Avec les noirs, vous pouvez vous tourner vers la défense Pirc ou la Caro-Kann (1. e4 c6).

Notre recommandation pour les débutants : jouez des ouvertures variées, pour explorer les différentes configurations qui peuvent apparaître sur l’échiquier. En jouant ainsi, vous progresserez bien plus vite, en étant confronté à des situations d’une grande diversité.

Il est bénéfique de varier vos ouvertures pour garder votre adversaire sur le qui-vive et éviter d’être trop prévisible. Cependant, il est également important de développer une connaissance approfondie d'un petit nombre d'ouvertures pour les maîtriser.

“J’estime que certains grands maîtres se chargent d’un fardeau à la limite intolérable. Il est plus rationnel de se restreindre, de faire une sélection d’ouvertures et de tout savoir en ce qui concerne les lignes de jeu que l’on préfère”

Alexandre Kotov

Faut-il se préparer dans les ouvertures avec une base de données informatique ?

Vous jouez en compétition à bon niveau (>1800) ? Alors utilisez des bases de données d'ouvertures informatiques pour explorer et analyser différentes lignes d'ouverture. Ces outils peuvent vous aider à découvrir de nouvelles idées et à affiner vos connaissances sur les ouvertures.

Vous découvrirez peut-être que votre adversaire joue toujours le même début de partie, et vous pourrez vous y préparer efficacement.

Le logiciel le plus utilisé est Chessbase. Il permet de travailler avec une base de données de plus de 10 millions de parties, et ainsi d’identifier les meilleurs coups ou d’anticiper les coups joués par votre adversaire.

Mais si vous êtes débutant ou joueur irrégulier, nul besoin d’utiliser ces outils informatiques. Utilisez votre précieux temps pour travailler d’autres aspects du jeu.

Bobby Fischer - Photo : Karpouzi, CC BY-SA 3.0

Laisson le mot de la fin au grand Bobby Fischer : « Je ne recommande pas d'essayer d'avoir de longues variantes en tête. L'idée principale derrière toute ouverture est d'obtenir un centre de pions puissant et donner à  vos pièces une grande portée pour que vous bloquiez la position de votre adversaire et que vous puissiez attaquer les faiblesses de sa position. »


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Les réactions (1)

  • copernic44

    Vos conseils sont précis ancien joueur de club, j'ai joué plusieurs parties de compétition en Régional II à la cadence ficher (1h30 - 40 cps + 30 mn avec 30 sec/cps). Ils faut évidement bien connaître les ouvertures. A l'époque au club on avait un MI pour nous entraîner. Mon conseil est de se créer un répertoire d'ouverture. J'ai acheté un livre de Nicolas Giffard "Les ouvertures avec les Blancs et les Noirs" Il y à aussi les 4 livres très complet de John Watson "Maîtriser les ouvertures" qui traite de toutes les ouvertures les plus souvent jouées. A partir de la choisissez celle qui semble vous convenir, puis vous la pratiquez en la jouent dans vos parties de club ou en ligne sur Europe Échecs ma plate-forme préféré! Dans votre expérience du jeu et vos analyse de vos parties vous aller commencer à créer votre "Répertoire d'ouverture" cet à dire les ouvertures qui vous plaisent et qui surtout qui correspondent à votre style de jeu (joueur d'attaque, plutôt stratégique, ou tactique)