Blitz à Chartres

Le billet quotidien d'Yves Marek sur la partie majoritaire Karpov - Reste du Monde, disputée à l'occasion du Tour de France.

Yves Marek

Aujourd'hui, le Tour de France organisait son dernier contre la montre, près des bords de l'Eure, entre Bonneval et Chartres. C'est l'occasion pour les fans du vélo d'apprendre qu'aux échecs aussi, la réflexion est limitée et que la pendule joue son rôle. Surtout lorsque l'on dispute des parties éclair en moins de cinq minutes pour tous les coups, dites parties de blitz.

Anatoli Karpov, qui vient d'arriver premier ex-aequo à un tournoi de blitz en Corse, a donc choisi cette étape pour venir assouvir sa passion et de la France et du vélo et venir suivre sur le terrain le Tour. Tout commença par une belle soirée autour de lui à l'invitation du maire et d'Europes-Echecs, comme il se doit pour un roi de l'échiquier, au "Grand Monarque". La Ville de Chartres, qui a abrité en 2005 le 80ème championnat de France des échecs, a la chance d'avoir un député-maire, Jean-Pierre Gorges, qui est un joueur d'échecs passionné, d'un niveau impressionnant pour un amateur, et qui excelle justement sur le site d'Europe-échecs dans des parties éclairs en moins de deux minutes.

Ce sont sans doute ces facultés de calcul exceptionnelles qui l'ont fait reconnaître comme l'un des meilleurs maires de France, un maire qui a réussi à baisser chaque année depuis onze ans les impôts, tout en dégageant des moyens pour renouveler l'image de la ville par la superbe opération Chartres en Lumières qui, tous les soirs d'été, attire des milliers de visiteurs pour non seulement méditer sur  le mystérieux et ésotérique labyrinthe de la Cathédrale mais pour admirer le spectacle féerique de la ville mise en lumière pour poursuivre la tradition médiévale du vitrail. Et sous son impulsion, Chartres est aussi devenue  la capitale du pôle français de compétitivité du parfum et de la cosmétique, si bien qu'à la différence des villes dépendantes de l'automobile et de mono-industries, Chartes voit se multiplier les implantations d'entreprises moyennes et sa population augmenter ! Un maire qui a du nez ! Autant dire qu'avec un tel bilan, Gorges, facile a toucher par ses administrés et ferme dans ses convictions, n'a presque pas besoin de soutiens ! Tant de succès furent  fêtés à la veille de l'étape autour de la cuvée spéciale que la prestigieuse maison de Champagne Giraud a créée à l'effigie d'Anatoly Karpov-Tour de France 2012.

Anatoly Karpov, après le retrait du fou en e8,  engage une course contre la montre puisqu'il profite de ce retrait pour mettre son roi a l'abri avant que noirs tentent de trouver un contre jeu.

Il racontait a Chartres que du temps de l'URSS les fédérations soviétiques des échecs et de cyclisme avaient le même médecin qui lui avait confié que le tiers de l'équipe nationale soviétique de cyclisme jouait aux échecs.

Pour célébrer cet événement dans une capitale du parfum, parmi d'autres huiles essentielles, un autre amateur d'échecs de prestige était venu, le cinéaste Jean Becker, sans doute le meilleur directeur d'acteur du cinéma français, à qui Jean-Pierre Gorges a pu dire "bienvenue parmi nous". S'il n'a pas aperçu parmi les cyclistes  "un nommé La Rocca", il a pu penser que pour certains coureurs qui ont raté ce tour, 2012 aura été "un été meurtrier" et ces deux dernières étapes "deux jours à tuer". Il regrettait que Froome  en "échappement libre", même si l'on sait bien, grâce à la fine analyse sémiologique du Tour par Roland Barthes dans "mythologies" la valeur morale du sacrifice du coéquipier. Wiggins, en remportant le contre la montre devant Froome, comme l'éclair, a eu un sursaut d'orgueil.

 

 

 

Yves Marek

auteur de "Art, échecs et mat" (éditions Actes Sud)

Anatoly Karpov | Photo : Claude Baranton (DR)

Suivez le compte-rendu de la journée du Tour de France sur le site dédié :

www.letour.fr/le-tour/2012/fr/etape-19/

La partie après 22. o-o

 


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Les réactions (1)

  • ins-1156

    Le desir de Tour de France devient,au fil des années,un désir de frustation.
    Peu importe.Car ce qui compte, c'est ce désir, même dévalué,qui s'abreuve sans relâche aux mythes héroiques de notre enfance ( la morale de l'effort,la solidarité,la performance du champion, la grandeur de la nature,..)et qui institutionnalise le Tour de France comme de dernier des metarécits.